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LOKADHAMMA (2ème
partie)
Discours du Vénérable Mahasi Sayadaw Traduit par Vipassanasangha ______________ YASA ET AYASA Les Puthujjanas
aiment être entourés de compagnons. Quand on a des enfants et de l’aide, on est
satisfait. On pourrait penser qu’avoir cela est un état permanent et oublier
que de telles choses, comme toutes les choses, sont impermanentes. Le sens de
permanence ou de plaisir est après tout une illusion. On ne parvient souvent
pas à le comprendre. Il y a des cas de séparation ou de mort de maris, femmes
et enfants et les gens sont plongés dans la souffrance parfois si grande
qu'elle entraîne la mort. Il n'y a aucune chance pour un état mental
méritoire parce que quand on gagne, on a l'avidité à l'esprit et quand on
perd, on a la colère et la douleur et ces états d'esprit arrivent souvent,
l'un après l'autre et il n'y a aucune chance pour gagner des mérites. Ainsi,
apparaît la renaissance, la vieillesse, la mort, des ennuis et des
tristesses. NINDA ET PASANSA Quand on reçoit des
éloges on est ravi. Quand on est soumis à la critique et calomnié on est
affecté. C’est parce que l'on ne se rend pas compte que les éloges et les
critiques sont là pour peu de temps, pas du tout permanentes. Quand on est joyeux
de recevoir des éloges on est pris dans lobha (avidité) et quand on
est affligé par la critique on est pris dans dosa (aversion). Il n'y a
aucune chance pour un état d'esprit méritoire d’apparaître. Comme kusala
(mérite) manque, on n'est pas libre de la renaissance, de la vieillesse et de
la mort, de tous les ennuis et de la misère. SUKHA (bonheur) ET DUKKHA
(souffrance) Quand on obtient ce
que l'on veut et qu’on peut en profiter, on est satisfait et heureux. Quand
on est ainsi heureux on oublie souvent de voir que cet état est impermanent
et contribue à l’insatisfaction. En fait, sukha ou plaisirs satisfont
les gens parce qu’ils se sont mobilisés et ont fait des efforts simplement
pour gagner cette sorte de sukha. C'est fascinant, en effet. C'est pourquoi un
certain deva dit une fois, en profitant des plaisirs de festivités
célestes dans le jardin céleste de Nandawun, que l'on ne peut connaître la
signification de sukha avant d’être allé au jardin Nandawun. Il dit
que ce jardin céleste est le lieu de plaisirs réels. Celui qui pense trop à
de tels plaisirs sera sûrement chagriné quand il rencontrera dukkha,
qui est le changement de sukha. Une telle personne ne sera alors pas
capable de considérer que toutes les choses sont impermanentes et mènent à la
souffrance. Une telle personne dit en général "je souffre" quand
elle souffre et "j'aime" quand elle aime. Ainsi quand on a sukha,
on est dans lobha et quand on fait face à dukkha, on est avec dosa.
De telles personnes ne seront pas libres de la renaissance et de ses
conséquences. En un mot, elles ne sortiront pas du samsara. Les remarques
précédentes concernent les êtres n’ayant pas la connaissance quand ils
rencontrent les huit Lokadhamma, mais dans le cas d'Ariyas
(êtres dotés de sagesse) qui sont les disciples du Bouddha, ils peuvent
tolérer les attaques de Lokadhamma et avoir la chance de créer des
mérites et être ainsi libérés du samsara. LES ATTRIBUTS SPÉCIAUX DE CEUX QUI ONT LA CONNAISSANCE
Pour les
sages : les Ariyas, si des cadeaux leurs sont offerts, ils
pensent à anicca, dukkha et anatta.. Ils ont la pensée
juste. Quand les cadeaux sont perdus ou détruits, ils restent équanimes.
C'est la différence de réaction entre un puthujjana et un Ariya.
L'Ariya est entièrement doté de la connaissance (agama sutta)
et en même temps il a profondément compris par la méditation anicca, dukkha
et anatta, la nature de tous les phénomènes (adhigama sutta).
Un Ariya, même un kalyana puthujjana (personne pieuse)
est pourvu d'agama sutta et aussi d’adhigama sutta.
En fait, un kalyana puthujjana est inclus dans le groupe de
personnes pieuses et nobles par les Ariyas. Même celui qui écoute, et
accepte les paroles du Bouddha doit être appelé son disciple. LE GAIN ET LA PERTE
Ainsi, les
disciples du Bouddha devraient réfléchir au caractère éphémère des cadeaux et
des acquisitions qu’ils obtiennent et aussi aux problèmes qui s’ensuivent à
propos de la richesse et de la prospérité. Ici, les problèmes ne concernent
pas les malaises physiques et les maladies; ils concernent les illusions
résultant de la joie des plaisirs, et des souffrances du chagrin causées
respectivement par le gain et la perte. Dukkha est ici de trois sortes : sankhara dukkha, viparinama
dukkha et pariyaya dukkha. Sankhara dukkha
est le résultat du caractère éphémère, impermanent et du caractère
insatisfaisant des choses qui arrivent et aussi du non-contrôle, de la totale
impuissance. Le gain acquis est susceptible d'être détruit et le fait d'être
périssable est désagréable, indésirable. C'est dukkha, ou sankhara
dukkha. La deuxième sorte, viparinama
dukkha est occasionnée par les changements et la destruction des
choses que l'on a gagnées. Si on ne continue pas à obtenir des choses ou si les
choses déjà acquises sont perdues ou détruites, cette sorte de dukkha
arrive. Pariyaya dukkha est, en fait, inclus dans la deuxième sorte
parce qu'il se rapporte à la cause de dukkha. Donc celui qui acquiert
des choses devrait penser au caractère impermanent et périssable des choses
gagnées et aussi au fait que le propriétaire de ces choses est périssable
aussi. Ceci est la pensée juste. Si on pense ainsi,
on ne sera pas submergé par la joie et la satisfaction que les acquisitions
ont créées. "La joie de la personne à la pensée juste disparaît
vite ; elle ne reste pas longtemps" dit le Bouddha. De la même
manière, la peine occasionnée dans l'esprit de la personne à la pensée juste
sera de courte durée. De telles personnes diront que les choses vont et viennent.
Un peu plus probablement quand les circonstances sont favorables. "Je
suis né sans rien et maintenant avec ce que j'ai, je suis entièrement
pourvu," penseraient-elles. Elles penseraient aussi à la nature
périssable de toutes les choses. Maintenant,
réfléchissons. Un pot en terre se casse quand il tombe mais un pot en métal
ne se casse pas. C'est juste naturel. Il faudrait prendre en considération la
nature des choses et en accepter les résultats avec un esprit calme. Il y a
des cas, cependant, où des gens âgés se fâchent quand des jeunes cassent des
choses en les faisant tomber. Ces personnes âgées n’ont pas souvent pensé à
la nature des choses. Une chose cassée ne peut plus redevenir entière et
intacte même si on se lamente. Donc nous devrions toujours penser à la nature
impermanente et périssable des choses et accepter les conséquences avec une
attitude d’adaptation appelée en Pali : yoniso-manasikara. Si on peut prendre
les choses comme elles sont, avec acceptation et adaptation, on ne souffrira
pas beaucoup des pertes. Pour une personne ordinaire, puthujjana, la
souffrance diminuera; pour un sotapan et un sakadagam la
souffrance est beaucoup moins grande et pour un Arahat il n'y a pas de
souffrance du tout. La personne qui
peut contrôler son esprit concernant le gain et la perte de richesse aura le
temps suffisant pour créer un état mental méritoire. Quand on obtient des
acquisitions, on peut éliminer l'état mental de joie et de possession en
faisant une note de cet état mental. De la même manière, on peut faire une
note de la déprime et l'éliminer ainsi quand on fait face à des pertes. Si
une telle déprime arrive, elle disparaîtra vite. Et il y aura la paix
intérieure. Le Bouddha a dit que celui qui n'est ni heureux des acquisitions
ni désolé des pertes ne désirera pas ardemment des acquisitions et ne sera
pas déprimé par les pertes. Une telle personne fera son propre travail,
c'est-à-dire pratiquer la méditation. LIBRE DU MALHEUR
Le disciple du Bouddha
qui n’est pas submergé par la joie et le chagrin sera libre de la
renaissance, de la vieillesse et de la mort, a dit le Bouddha. Le Bouddha a
enseigné que si on n’est pas submergé par ses émotions concernant les
bénéfices et les pertes qui peuvent arriver, on sera capable de consacrer son
temps à noter anicca, dukkha et anatta pour toutes les
choses physiques et mentales, et une telle personne sera finalement capable
d'atteindre Nibbana. Une fois qu'elle aura atteint ce stade, il n'y
aura aucune nouvelle existence pour elle et ainsi elle sera libérée de la
souffrance de la vieillesse et de la mort. Si on a atteint sotapanna
maggañana, on n’aura pas plus de sept existences avant d'atteindre
l'état suprême où il n'y a plus aucune nouvelle existence, c'est-à-dire Nibbana,
la fin du samsara. Pour un sakadagam
il y a au plus encore deux existences et pour un anagam seulement
encore une existence avant d’atteindre Nibbana. Si on devient un Arahat
dans l'existence présente, il n'y a plus aucune existence nouvelle. Celui qui n’est pas
perturbé par les bénéfices et les pertes est libre du chagrin, de la
dépression et de la souffrance; en fait, de toutes les sortes de souffrance.
"Ce que je dis est sûr" a dit Bouddha. être libre des souffrances de toutes sortes donne de paix
mentale même dans l'existence présente. En pensant à anicca, dukkha
et anatta pour toutes les choses gagnées ou perdues, on ne sera pas
chagriné et, on gagnera ainsi la paix intérieure. Cette paix peut être gagnée
même dans l'existence présente si on demeure équanime. LA MEILLEURE MÉTHODE POUR SE DÉBARRASSER DE L’INQUIéTUDE Bouddha a dit
"la méthode pour se débarrasser de l'inquiétude, de la peine, de la
dépression et des lamentations est de suivre le chemin de quatre sortes du Satipatthana.
C'est la seule façon d'éliminer la souffrance." C'est la meilleure
façon de se débarrasser de la misère parce que c'est la seule voie pour
atteindre le stade d'arahat et obtenir la liberté complète de toutes
les sortes de souffrances. C'est l'assurance que Bouddha a donnée. Cela se rapporte
jusqu'ici à la première paire de Lokadhamma, c'est-à-dire les
bénéfices et les pertes. Les résultats de la pratique de Satipatthana
concernant les trois autres paires sont les mêmes. Donc je parlerai brièvement
d'eux. AVOIR OU NON DE LA COMPAGNIE
Quand le disciple
de Bouddha ayant la connaissance possède beaucoup a plein de compagnons et
d’aides, il pondère cette situation en notant anicca, dukkha et
anatta pour toutes choses. Il sait qu'il n’en sera pas toujours ainsi
pourvu et aussi qu'il y a des ennuis avec la famille, les employés et les
compagnons. Il peut en être séparé pour une raison ou une autre et il pondère
ces situations de nature impermanente. Il ne souffrira pas de dukkha
quand la séparation réelle arrivera. Il peut contrôler son esprit et être
ainsi soulagé. Il se rend compte qu'il est mieux de vivre seul parce qu' on
est alors libre de responsabilités et d’entraves. Si seul on n’est pas
triste, mais au contraire on est même heureux; on ne sera pas affecté par la
perte. Comme on n'est donc pas submergé par la tristesse, on aura le temps de
se consacrer à la pratique de la méditation et être libre de toutes sortes de
misère. GRATITUDE ET CONDAMNATION
Aussi, quand on reçoit
des éloges, il faut penser à l'état impermanent de ces éloges. Il faut
considérer le fait que les éloges "me" sont données, moi qui ne
suis après tout qu’un ensemble de rupa (matière) et nama
(esprit), qu’il n'y a aucun "je" et que bientôt ce "je" sera
l’objet de condamnation et de mépris. Il faut rester équanime et trouver
ainsi la paix intérieure. Il faut penser à vivre une vie sans nuisance et
acquérir ainsi le réel bénéfice de ne pas faire l’objet de critique par les
autres ou de condamnation. Si on peut le faire, on ne sera pas trop affecté
par le jugement des autres et on aura le temps pour la pratique de la
méditation et on trouvera ainsi la voie pour s’affranchir de toutes les
sortes de misère. RAPPORT ENTRE SUKHA (bonheur) ET DUKKHA (souffrance) Nous devons penser
au cas où la prospérité et le bien-être prévalent, de la façon suivante : "Bien que
j’obtiens maintenant ce que je veux avoir, je ne les obtiendrai pas toujours,
car quand des circonstances défavorables viendront, toutes ces choses
désirables disparaîtront et je serai dans l’embarras. Maintenant je suis en
bonne santé, à l'aise et sukha existe, qui est après tout soumise au
changement et quand sukha se transformera en dukkha, je
souffrirai sûrement. Même maintenant, bien que je jouis des bonnes choses de
la vie, je discerne que toutes les choses, y compris moi-même, sont par
nature anicca, dukkha et anatta." Si vous êtes ainsi
préparés, vous souffrirez peu quand sukha se transformera en dukkha
quand les circonstances changeront. De la même manière,
quand dukkha apparaît, vous devez penser à anicca, dukkha
et anatta et vous dire que dukkha ne prévaudra pas tout le
temps, et quand les circonstances changeront, sukha viendra. S'il ne
vient pas pendant cette durée de vie, il reviendra sûrement dans l'existence
suivante parce que toutes les choses sont sujettes au changement viparinama.
Même pendant cette existence, des changements pour le mieux se produiront à
cause des bonnes actions que vous avez faites. Si vous pensez ainsi, la piqûre
du malheur ne sera pas si aiguë et vous éprouverez du soulagement. Si vous
faites constamment une note de dukkha que vous expérimentez, votre samadhi
(concentration) se développera et la douleur et l'abattement s’effaceront et
vous serez heureux. REMÈDE TRÈS EFFICACE
Si vous souffrez
d’effets néfastes à cause de maladies, ou de conditions climatiques et si
vous n'avez aucun autre remède pour soulager la douleur et la souffrance, la
pratique de la méditation, si elle ne vous permet pas de guérir complètement,
peut apporter au moins un certain soulagement. Si la douleur et la
souffrance restent dans votre corps, la pratique de la méditation pourrait
apporter un soulagement à votre esprit. Mais si vous êtes en colère ou irrité
par la souffrance physique, votre esprit souffrira aussi. Bouddha a comparé
cette souffrance duelle au fait d’être transpercé par deux épines en même
temps. Disons qu’un homme
a une épine dans sa chair et qu’il essaye d'extraire l'épine en enfonçant une
autre épine dans sa chair. La deuxième épine fait irruption dans la chair
sans être capable d'extraire la première épine. Alors l'homme souffre de la
douleur des deux épines en même temps. Ainsi aussi, la personne qui ne peut
pas noter la douleur physique par la méthode de méditation souffre à la fois
physiquement et mentalement. Mais si cette personne ressent seulement juste à
la douleur physique, elle souffrira seulement de cette douleur et non de la
douleur mentale. Cette souffrance
est seulement la douleur physique, comme celle ressentie par le Bouddha et
les Arahats, car eux aussi subissent la douleur physique. Ils
souffrent des effets néfastes de la chaleur et du froid, des piqûres
d’insectes et d'autres sortes de malaises. Bien qu'ils souffrent de dukkha
physiquement, leur esprit reste stable, donc ils ne subissent pas la douleur
mentale. Donc la méthode de
méditation est le meilleur remède contre la douleur physique et la
souffrance. Il y a des cas de soulagement obtenus par cette méthode par ceux
souffrant d'agonie aussi sévère que l'agonie de la mort. La personne ayant
la connaissance qui est un disciple du Bouddha, peut penser à la vraie nature
de sukha quand il arrive et s’épargner ainsi d'être pris par la joie,
et quand dukkha vient s’épargner d’être accablé par la misère et ainsi
maintenir l'équanimité. Cette méthode seulement peut surmonter les
changements de Lokadhamma de la vie. Quand on a l’esprit
calme et stable malgré les attaques de Lokadhamma, on a une occasion
de maintenir un état mental pur en notant constamment les changements
apparaissant aux six "portes" du corps en pensant à anicca, dukkha
et anatta. La pratique constante de la méditation, c'est-à-dire vipassana
ñana, développe le mental, et on gravit graduellement les quatre étapes
d'ariya magga. Ainsi, on est libéré des mailles de la
souffrance. C’est l’assurance que donna le Bouddha. Les variations de Lokadhamma
prévalent dans tous les plans d'existence et personne n’ en est exempt, pas
même Bouddha. Bouddha, cependant, pouvait faire face à ces attaques avec une
grande patience et stabilité d'esprit. Nous devrions prendre cet exemple et
travailler dur. Les gens souhaitent
naturellement de bonnes choses dans la vie et font de leur mieux pour les
obtenir, et en même temps ils essayent d'éviter les mauvaises choses, les
douleurs et les souffrances, mais personne ne peut échapper à leur attaque.
Comme il a été dit, même Bouddha n’a pas pu leur échapper. Nous devons donc
nous dire : "Même Bouddha n’a pas pu échapper aux attaques de Lokadhamma;
comment une personne ordinaire comme moi peut-elle espérer leur
échapper?" Pensant à la
patience et à l'équanimité du Bouddha quand il subissait de telles attaques,
nous devrions faire de notre mieux pour suivre son exemple. Je vous parlerai
maintenant des conséquences néfastes de Lokadhamma dont Bouddha a
souffert. ALABHA ET BOUDDHA Une fois le Bouddha
résidait près d'un village de Brahmanes appelé Pancasala. La raison de son
séjour était qu'il avait prédit que 500 jeunes filles de ce village
atteindraient le stade de sotapanna. Le jour de la cérémonie de
dévotion aux planètes, on permit aux jeunes filles de sortir du village et
d’aller à la rivière se baigner. Elles retournaient au village après le bain
et à ce moment-là Bouddha entrait dans le village Pancasala pour sa tournée
d'aumônes. Le nom Pancasala
signifie "cinq maisons". Le village a été fondé par seulement cinq
ménages et plus tard il s’est développé et est devenu un village plus grand. Puisqu'il
y avait cinq cents jeunes filles, la population du village ne devait pas être
inférieure à deux mille et il y avait naturellement beaucoup de maisons, cent
ou à peu près Les villageois
étaient alors sous le charme de Mara, l’esprit malveillant, et ne purent donc
pas préparer les offrandes pour le Bouddha. Donc le Bouddha ne reçu même pas
une cuillère de riz. Sur son chemin de retour, Mara demanda au Bouddha,
"Bhikkhu (Moine), avez-vous obtenu des offrandes?" Le
Bouddha dit alors : "Mara, vous avez empêché les villageois de
m'offrir de la nourriture, n'est-ce pas ?" Mara répondit :
"voudriez-vous y retourner s'il vous plaît et faire la tournée
d’aumônes?" Il voulait que les villageois se moquent du Bouddha. À ce moment, les
cinq cents jeunes filles arrivaient à la porte du village de leur retour de
la rivière. Elles se prosternèrent devant le Bouddha et s’assirent à une
distance appropriée. Mara demanda au Bouddha : "si vous n'obtenez
pas de nourriture, vous n’êtes pas malheureux?" Le Bouddha était
venu à ce village pour avoir l’occasion de délivrer un sermon aux cinq cents
jeunes filles. Le Bouddha dit : "Hé, Mara! Même si je ne reçois pas
à manger aujourd'hui, je resterai dans piti sukha (la joie
spirituelle) comme le grand Brahma du plan d'existence
Abhassara." Spécialement pour
les cinq cents jeunes filles, le Bouddha dit en Pali les vers suivants : Susukham vata
jivama Yesam no natthi kincanam. Pitibhakkha bhavissama Deva abhassara yatha. Nous n'avons aucun
désir de posséder, ni d'inquiétude provenant de raga (le désir des
sens) et des kilesas (les impuretés). Nous vivons heureux. Pour
aujourd'hui, comme les Brahmas d'Abhassara, nous vivrons de
l'alimentation de piti (la joie spirituelle)". Les gens tuent et
volent pour gagner leur vie. Ils font des affaires en mentant et en trompant.
De tels gens pensent qu'ils ont le bonheur en tirant profit de leurs méfaits,
mais en réalité ils vont vers la misère, car ils iront en enfer à cause de
leurs méfaits. Même si on gagne sa vie par des moyens honnêtes, on ne peut
pas dire que l'on gagne sa vie avec joie, sauf si c’est sans désir ni
inquiétude. Quant au Bouddha,
il n'y avait aucun raga résultant du désir et de l'inquiétude, ni dosa
provenant de la déception d’être rejeté, ni moha résultant de fausses
notions de ce qui est bien. Le Bouddha était sans kilesa et est ainsi
resté calme avec un mental stable malgré le fait qu'il n'avait obtenu aucune
offrande de nourriture ce jour-là. C'est en effet le bonheur du dhamma.
Donc notre Bouddha vivait heureux malgré les épreuves. Cependant, on peut
se demander si le Bouddha pouvait vivre heureux sans alimentation pendant
cette journée. Tous les êtres dans les plans d'existence (sensuels) kama sont
obligés d’avoir les quatre nécessités : (kamma, citta, utu et ahara)
pour rester vivants, c'est-à-dire maintenir leur existence physique. On peut
probablement rester vivant avec les trois premières nécessités; on a
certainement besoin d’avoir ahara : l'alimentation. L'homme doit
prendre de la nourriture deux ou trois fois par jour. Les animaux doivent
sortir pour obtenir leur alimentation. Des trois facteurs de vie :
l'alimentation, les habits et le foyer, l'alimentation est la plus
importante. Aller chercher la nourriture est le plus grand problème, et tous
les êtres sont en recherche constante d'alimentation. Les fourmis sont
travailleuses; elles se déplacent pour chercher l'alimentation jour et nuit.
Elles ne peuvent pas rester calmes et stables sans alimentation. Questionné au sujet
de l'alimentation, le Bouddha répondit que, comme les Brahmas de la
région Abhassara dans le monde céleste, piti était sa nourriture. Les Brahmas
ne mangent pas de nourriture. Ils sont toujours dans un état de jhana
avec piti sukha et ils en vivent. Ils n'ont jamais faim; ils sont
toujours dans piti sukha qui est fortement développé quand ils
ont atteint le deuxième stade de jhana. Des Brahmas qui ont
atteint ce second stade, les Brahmas de la région Abhassara ont la
plus grande piti sukha. C'est pourquoi le Bouddha dit qu'il pourrait
rester heureux comme les Brahmas de la région Abhassara bien qu’il
n'ait rien eu à manger ce jour là. La joie peut être
substituée à l'alimentation. Ce fait est connu tant dans le monde ordinaire
que dans le monde spirituel. Les personnes ravies par le succès de quelque
chose pour lequel elles ont travaillé très durement ressentent une grande
joie et elles n'ont pas envie de manger ou de dormir. Ceux qui ressentent
de la joie pour les actes méritoires qu'ils ont fait, peuvent se passer d’un
ou deux repas. Ceux qui sont en profonde méditation restent assis pendant un
ou deux jours sans se lever pour s’alimenter, uriner ou déféquer. Le Bouddha
pouvait rester calmement assis pendant une semaine entière quand il était en phala
samapatti ou niroda samapatti. Il pouvait rester sans
alimentation tout à fait facilement pendant un jour simplement en entrant en vipassana.
Il dit donc que piti était l'alimentation pour lui ce jour. La réponse
était faite par le Bouddha à la question de Mara, mais les cinq cents jeunes
filles entendirent ce sermon et toutes atteignirent le stade de sotapanna. Pourquoi ces jeunes
filles sont-elles devenues sotapan simplement en entendant la réponse
du Bouddha à la question de Mara ? La raison réside dans le fait que ces
jeunes filles avaient des paramis spéciales (des perfections). Elles
avaient eu l’opportunité de voir le Bouddha en personne, de le vénérer, et
aussi d’entendre son sermon. Donc elles étaient remplies de joie (piti)
et aussi de foi dans le Bouddha résultant de leur conviction de sa noblesse
prouvée par son être libre des kilesas
et de son piti malgré le manque de nourriture ce jour. Elles
réfléchirent à la nature d’anicca, de dukkha et d’anatta
du piti du Bouddha et eurent une compréhension intuitive menant à l'atteinte
de l'état de sotapanna. Maintenant,
l'auditoire écoutant ce discours peut aussi réaliser une telle compréhension
et réalisation, si seulement vous pouvez clairement visualiser la scène à la
porte du village de Pancasala et réfléchir à la réponse du Bouddha à la
question de Mara. Vous pouvez avoir piti aussi et si vous expérimentez
le piti de la méditation, vous pouvez obtenir l’accomplissement
semblable atteint par les cinq cents jeunes filles du village. LA QUESTION DE MILINDA
En se référant à
cet incident au village de Pancasala, le roi Milinda posa une question au
Vénérable Nagasena : « Vous dites tous que le Bouddha recevait
plein de cadeaux, des cadeaux sous forme de robes, de nourriture, monastères
et médicaments, les quatre besoins utiles pour un moine, et vous dites que le
Bouddha n’obtint même pas une cuillère de riz de sa tournée d’aumônes au
village de Pancasala. Ces deux déclarations sont contradictoires. Si le
Bouddha avait plein de cadeaux, on n’aurait pas dit qu’il n’avait même pas eu
une cuillère de riz. Ainsi on ne devrait pas dire que le Bouddha avait plein
de cadeaux. Vénérable Nagasena, s’il vous plaît expliquez-moi cette
contradiction ». LA REPONSE DE NAGASENA
« roi Milinda,
il est juste de dire que le Bouddha avait plein de cadeaux. Il est également
juste de dire que le Bouddha n’eut même pas une cuillère de riz au village de
Pancasala. Mais le fait qu’il ne reçut pas de nourriture au village de
Pancasala, ne signifie pas qu’il connaissait la privation. Il y avait un villageois
qui vint au palace d’un empereur pour lui offrir un pot de miel. Le gardien
du palace royal dit au villageois : « il n’est pas l’heure pour sa
Majesté de recevoir de visiteurs. Allez-vous en sinon vous serez mis en garde
à vue ». Le villageois fut effrayé et partit avec le cadeau qu’il
voulait offrir à l’empereur. L’empereur fut privé de ce cadeau, mais cela
signifie t-il que l’empereur connut la privation ? De la même façon,
le Bouddha avait plein de cadeaux, mais dans cet exemple, Mara agissant comme
le gardien de l’empereur, empêcha les villageois d’offrir au Bouddha
l’aumône. Cela prouve t-il que le Bouddha connaissait la privation ?
Vous ne devriez pas le comprendre ainsi : à l’exception de ce jour,
pendant 45 ans, c’est-à-dire pendant plus de 16 400 jours le Bouddha reçut
d’innombrables cadeaux chaque jour. Il est donc juste de dire que le Bouddha
avait plein de cadeaux » répondit le Vénérable Nagasena à la question du
roi. Nous devons savoir
que pour la parami dana que le Bouddha avait accompli dans ses
existences précédentes pendant 4 éons et 100 000 mondes, il eut un nombre
énorme de cadeaux de toutes sortes. Alors que pour à peine un jour il fut
privé à cause des machinations diaboliques de Mara. Il fut confronté à la
phase alabha de Lokadhamma pour un moment. Comme pour nous,
être humains ordinaires, les phases de Lokadhamma nous rendront visite
sans faille. Si nous pouvons suivre les pas du Bouddha avec une grande
confiance en lui et cultiver la patience pour supporter l’adversité, nous serons
libérés dans une certaine mesure de la souffrance. |
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